mercredi 14 mars 2012

Sarkollande 2, l'alternance tranquille

Je suis en colère contre ces gens, soi-disant de gauche, qui s’apprêtent à voter Hollandréou. Ce billet ne s'adresse qu'à ceux qui sont vraiment persuadés de voter à gauche en votant FH. Que ceux qui cachent leur mauvaise conscience de droite en votant pour lui, et ceux dont le vote dépend de leur intérêt propre, passent leur chemin rapidement; ceux-là seront toujours assez nombreux pour l'amener au second tour.
Tout d'abord,  je précise que les "propositions" de Flamby ne sont pas celles de son parti. Je n'y reviens que pour rappeler à ceux qui s'apprêtent à lui faire confiance qu'il s'est présenté aux primaires avec le socle programmatique du PS. Mais, à peine choisi, il proclame à plusieurs reprises s'en distancer, notamment sur la politique économique, l'emploi public, les retraites, les allocations familiales, la fiscalité... Bien que je n'en ai rencontré aucun, certains de ceux qui ont voté pour lui aux primaires ont dû avalé leur première couleuvre avant même l'élection...

Une autre généralité, bien réelle, qui me semble caractériser l'animal est sa propension à l'hésitation, aux atermoiements de collégien. Ses erreurs de début de campagne en attestent. Certains appellent cela un "candidat de synthèse"... D'autres y voient un positionnement centriste du candidat PS. Je le situe pour ma part à l'extrême centre, là où l'on ne fâche personne, en accord avec chacun. Aurait-il à se prononcer pour une règle d'or européenne avec effet d'austérité permanente qu'il dénonça autrefois, qu'il opterait immédiatement pour une "abstention offensive" (sic)! Devrait-il prendre position sur l'immigration ou l'insécurité, qu'il hausserait le ton et froncerait les sourcils pour ne pas laisser à l'UMP et au FN les monopoles de ces thèmes. Sans doute que lorsqu'il affrontera ses ennemis de la finance, osera-t-il la condamnation formelle des paradis fiscaux?

Pour preuves encore de son incapacité à choisir, sont ses prises de position à l'international, rares mais systématiquement schizophréniques. Dénonçant la finance comme son "véritable ennemi" au meeting du Bourget, il rassure la "City" quelques jours plus tard en limitant le bilan de la gauche au pouvoir aux privatisations de grandes entreprises et à la libéralisation historique des marchés. Plus récemment, c'est son émissaire aux Etats-Unis, Président PS du Sénat, qui  déclare: "Nous sommes là pour préparer ces rencontres [G8, OTAN..., ndlr], il (François Hollande) n’est pas là pour renverser la table". Manière on ne peut plus claire de capituler avant de livrer la première bataille contre les "marchés".

Pensez-vous qu'il mente à ses futurs "partenaires"? Ceux avec lesquels il devra composer chaque jour de son quinquennat? Ou bien à ses électeurs, dont il n'aura plus besoin pendant cinq ans? Quelles sont au fond les véritables convictions de F. Hollande? Poser cette question, c'est admettre qu'il n'en a pas. Il nous annonce seulement une politique de compromis au sein d'une sphère d'influence dont les militants sincères du PS seront exclus, comme ils l'étaient lorsqu'il assumait la direction du parti. Cette sphère d'influences est composée des puissances de l'argent regroupant financiers, médias et groupes de pression qu'il "rassure" à chaque occasion; des dirigeants politiques européens, américains, asiatiques qu'il évite soigneusement de heurter; de dirigeants de son parti qui  lorgnent les postes qu'ils attendent depuis trop longtemps.

Un autre signe d'extrême-centrisme est la méthode proposée par le candidat PS: l'organisation de la concertation sur tous les sujets: conférence économique et sociale, concertation sur la viande halal, fonction publique, décentralisation, filière agricole...
 «C’est typique de la méthode Hollande !, souligne un de ses camarades. Avec lui, on peut toujours négocier...» Mais, rétorque un autre, «à chaque fois qu'il promet quelque chose, le plus sûr est qu'on ne l'aura pas».
Autant le dialogue est souhaitable lorsque les forces en présence sont équilibrées et représentatives, autant le contexte actuel ne s'y prête pas. Qui peut croire que les salaires, le temps de travail, les conditions de travail peuvent être améliorés par la concertation, alors que la décision finale est entre les mains d'actionnaires dont l'intérêt est de réduire la fonction publique et les cotisations sociales, sous prétexte d'endettement et de compétitivité? Comment rétablir la fonction publique lorsque des services essentiels tels que la gestion de l'eau et de l'énergie sont et resteraient aux mains d'intérêts privés? Comment aboutir à une rationalisation des collectivités locales si elles sont les seules parties prenantes de leur propre réforme, et sans que leur représentativité ne soit remise en cause? La Commune de 1871 avait-elle convoqué une conférence pour clamer son refus de l’ordre des choses? Le Conseil National de la Résistance a-t-il consulté les "pouvoirs intermédiaires" avant de légaliser la Sécurité sociale? La gauche au pouvoir en 1981 a-t-elle encouragé la concertation pour faire progresser les acquis sociaux?

L'Histoire montre que le progrès social en dehors de périodes de forte prospérité n'a été obtenu que de haute lutte. Le meilleur parallèle avec la période actuelle est l'avènement du Front Populaire pendant la crise des années trente, qui obtint du gouvernement de Léon Blum les accords de Matignon (droit syndical,  hausse des salaires de 12% en moyenne, congés payés, semaine de travail de 40 heures, billets de train avec 40 % de réduction pour les départs en vacances, loi sur les allocations chômage, politique de nationalisations dans l'industrie aéronautique, d'armement puis des chemins de fer...) avec l'accord d'un patronat effrayé autrement de tout perdre.

Si je reproche tellement à F. Hollande son positionnement politique, c'est bien parce qu'il ne peut ni ne veut incarner l'espoir d'un renouveau à gauche. Son ambition est de peindre en rose la droite "décomplexée" de Sarkozy sans renverser le rapport de forces. S'il était de gauche, il rétablirait les droits à la retraite à 60 ans, il préconiserait une révolution fiscale, il nationaliserait les banques, il indexerait les salaires sur les prix, il... Sous couvert de soutiens tels que B. Hamon, A. Montebourg ou H. Emmanuelli auxquels il promet de jolis postes, c'est bien la politique du FMI, de l'OMC, de la BCE qui, avec lui, poursuivra son œuvre de grignotage des acquis sociaux et l'accroissement des inégalités.

Ceci n'est pas un procès d'intention. C'est une analyse factuelle du candidat Hollande. Vous connaissez les enjeux de ces élections, et le "calibre" du bonhomme. Voici maintenant en détails ses propositions:

Neuf mesures, sur soixante, destinées à lutter contre la spéculation, le mal-logement, le travail précaire, les licenciements boursiers et l'autorité des actionnaires sur les salariés. Mesures souvent imprécises même dans leurs objectifs. Qu'en serait-il autrement, puisqu'en dix années d'opposition, il n'a visiblement pas su établir ce dialogue avec les "forces vives" du pays qu'il se propose seulement de démarrer?

On aura bien sûr relevé l'emploi du JE socialiste, qui se différencie tellement du JE libéral et autoritaire.

Rien sur les salaires, les libertés individuelles, les solidarités, la durée du travail, la répartition des richesses, la formation tout au long de la vie, la justice sociale, la lutte contre la délinquance financière, la coopération internationale et, bien sûr, rien sur la démocratie participative.

Presque rien sur la lutte contre la capitalisme, la fiscalité progressive, la violence des conditions de travail, la xénophobie, l'intégration des personnes handicapées, la transition énergétique, la sécurité alimentaire et sanitaire...

Pas de grand dessein, pas de perspectives, pas d'objectifs ambitieux, sinon le retour à l'équilibre budgétaire en 2017. Avec Hollande, nous repeignons le chemin de l'austérité en rose, car c'est beaucoup plus joli! En effet, contrairement à celles de Sarkozy ou du FN, aucune proposition n'est vraiment scandaleuse. Cela suffirait-il à le classer à gauche? Elles sont seulement inodore, incolore, indolores. On a beau chercher, aucune ne pourrait être reniée par le candidat Bayrou dont il a bien du mal à se différencier. Equilibre, Libéralisme et Individualisme sont leurs maitres-mots.

Laissez-le collecter les voix des "tout sauf Sarkozy"; elles seront amplement suffisantes pour le porter au second tour. Mais faites aussi entendre votre sensibilité de gauche pour qu'enfin un vrai changement soit possible, pour que l'Humain prenne le pouvoir contre les fascismes, pour que nos enfants, un jour, nous remercient peut-être d'avoir "embelli la vie".

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